Cizeta Moroder V16T, le rêve inachevé

Au départ, toutes les conditions étaient réunies pour que le projet Cizeta Moroder réussisse. Pourtant, ce qui était la supercar ultime au début des années 90 a été un fiasco retentissant.

Installé aux Etats-Unis, l’italien Claudio Zampolli travaille pour Lamborghini où il a la charge de réorganiser le réseau de distribution de la marque. Passionné par la Countach, il nourrit secrètement le projet d’élaborer une voiture de sport reprenant les grandes lignes de cette dernière, tout en faisant mieux. Pour ce faire, il a besoin d’un capital de départ important et c’est une rencontre fortuite qui va sceller son destin. Dans une concession Lamborghini, il fait connaissance avec le célèbre producteur et musicien Giorgio Moroder. Ce dernier est séduit par le projet et s’associe à Zampolli.

Moteur raffiné

Appelée Cizeta (les initiales de Claudio Zampolli en italien) Moroder, cette voiture est conçue par des anciens de chez Lamborghini qui ont été débauchés pour l’occasion. Parmi le personnel transalpin figure le designer Marcello Gandini qui a amène ses premières esquisses de la Lamborghini Diablo, voiture qui a été finalement retouchée par Chrysler, propriétaire de la marque. La ligne de Cizeta est scellée avec les nombreuses remarques de Zampolli, particulièrement pointilleux. Pour sa voiture, celui-ci veut le meilleur et le plus exclusif. Rejetant l’architecture V12, il décide que le moteur de ce bolide doit être…un V16 ! D’une cylindrée de 6 litres, ce bloc à 8 arbres à cames et 64 soupapes développe 540 ch et 544 Nm. Cette usine à gaz est alimentée par une double injection Bosch K-Jetronic.

Performances de haut-vol

La Cizeta Moroder V16T dispose d’un châssis tubulaire sur lequel repose une carrosserie en aluminium qui a la particularité d’être particulièrement large dans sa partie arrière : 2,05 m ! Malgré un poids important de 1.702 kg, la prototype est capable d’accélérer de 0 à 100 km/h en 4 secondes et il atteint 328 km/h en pointe. De couleur blanche, il est présenté en 1988 à Los Angeles à la haute société californienne. L’année suivante, la voiture est exposée dans les salons de Los Angeles, puis de Genève où les premières commandes sont enregistrées. De son côté, Giorgio Moroder jubile : il compte bien en construite entre 50 et 100 par an. Pourtant, un détail est pour le moins étonnant : conçue au départ pour le marché américain, la Cizeta Moroder n’y est pas homologuée, ce qui lui fait perdre une grande partie de sa clientèle potentielle !

Retard et brouille

Fabriquée à Modène, la voiture prend beaucoup de retard dans son processus de fabrication. Excédé, Moroder s’adresse au préparateur allemand Gemballa, connu pour son travail sur des Porsche, afin de trouver des solutions. Zampolli le prend comme une trahison et les deux hommes se brouillent. En 1990, Moroder décide de quitter l’entreprise et emporte avec lui le prototype blanc en guise de dédommagement. Fortement affaiblie financièrement, la firme continue ses activités et ne produit que 7 véhicules entre 1991 et 1995. Vendue bien plus cher que prévu, la Cizeta souffre de la crise économique en Asie, le marché où elle se vend le plus, et c’est la faillite.

Pas découragé

En 1995, Zampolli fait rapatrier les outils en Californie et la société renait de ses cendres. Seuls deux véhicules sont encore produits, en 1999 et 2003. Malheureusement, l’homme d’affaires accumule les déboires (faillite personnelle, procès, etc.) et l’aventure ne va pas plus loin. Malgré le fait qu’elle est encore proposée à la commande jusqu’en 2018, la Cizeta ne trouve pas d’acquéreurs. Zampolli décède en 2021 et l’année suivante, Moroder met en vente aux enchères son prototype blanc qui change de propriétaire pour la somme rondelette d’1,36 million de dollars.

A propos de l'auteur:

Lire plus