Matra Rancho, le polyvalent

Avec beaucoup d’idées et peu de moyens, l’équipe de Matra Automobiles a pu concocter le Rancho, un véhicule conceptuel qui préfigurait le SUV, de nombreuses années à l’avance !

Avec pour seul modèle le coupé Bagheera, Matra a besoin d’un autre modèle pour voir ses ventes décoller. Ce dernier ne doit toutefois pas être trop « grande série », histoire de ne pas concurrencer Simca-Chrysler, partenaire depuis 1969, qui distribue ses voitures. Après réflexion, le choix de Matra se dirige sur un véhicule de loisirs, à une époque où la Citroën Méhari et Renault Rodéo connaissent le succès. Malheureusement, la firme de Romorantin n’a pas les moyens suffisants pour se permettre la conception d’un modèle entièrement neuf. Qu’à cela ne tienne, les ingénieurs se penchent sur ce qu’ils ont en stock pour développer la nouvelle voiture. Leur choix se porte sur l’utilitaire Simca 1100VF, sur le moteur 1,4 litre de la Simca 1308 et des pièces de plusieurs autres modèles. Cette « soupe » est complétée par une cellule arrière innovante développée en interne. C’est le designer Antoine Volanis qui se charge de la dessiner. Très vitrée et composée de deux volumes, elle offre un grand espace intérieur aux passagers. L’idée de génie est de donner au Rancho de grands vitrages et un look de baroudeur, faisant de lui le précurseur des actuels crossovers et autres SUV.

Succès inespéré

Lancé à Genève en 1977, le Rancho étonne et fascine autant qu’il repousse une clientèle peu habituée à son excentricité dans un marché qui était très classique. Même l’état-major de la firme n’était pas spécialement convaincu de son succès et l’objectif de vente est fixé à 20.000 unités. Sous le capot, on retrouve le bloc 1.442 cc qui développe 80 petits chevaux. L’objectif de ce véhicule n’est pas vraiment d’être performant. Par contre, l’équipement se veut généreux pour l’époque. Pour ne pas passer inaperçu, Matra-Simca retient des teintes extérieures très « pop » qui ne font qu’accentuer son identité unique en son genre. En 1979 est lancée la version Grand Raid qui se caractérise par sa roue de secours située sur le toit, ses vitres teintées et ses deux optiques supplémentaires placées sur les ailes : une vraie invitation à l’aventure même si le Rancho n’est pas du tout un tout-terrain. L’année suivante, il abandonne le badge Matra-Simca au profit de Matra-Talbot, suite au rachat de la firme par Peugeot. Une très originale version découvrable est lancée, de même qu’une déclinaison Commerciale utilitaire. Toutes deux se vendent mal et sont abandonnées l’année suivante. C’est en 1983 que la production du Rancho est arrêtée, alors qu’il est vendu jusque l’année suivante. En tout, 56.457 exemplaires ont été produits, dépassant de très les loin les espérances initiales.

Carrosserie bio...dégradable

Merveilleuse voiture de loisirs, le Rancho était confortable, spacieuse et agréable à conduire malgré sa mécanique peu puissante, sa boîte de vitesses à 4 rapports et l’absence de transmission intégrale qui lui a barré l’accès à certains marchés. Les personnes qui ont eu l’occasion de la pratiquer ont toutes gardé une excellente impression de cet engin inclassable mais tellement attachant ! Si vous désirez vous prendre pour Claude Brasseur qui en conduisait un dans le film « La Boum » (1980), c’est principalement en France que vous avez des chances de trouver votre bonheur. Malheureusement, la corrosion est l’ennemi numéro un du Rancho qui est devenu assez rare sur le marché. Si la mécanique est très costaude (sauf la boîte dont les synchros se fatiguent assez vite) et que les pièces nécessaires à l’entretien se trouvent facilement, les éléments spécifiques d’accastillage et de carrosserie ne sont plus reproduits et sont donc rares. Mieux vaut donc opter pour une voiture complète et saine. Les beaux exemplaires oscillent entre 10.000 et 15.000 €, une cote très correcte pour un engin méconnu qui attire la sympathie partout où il passe.

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