Lucien Rosengart, le génial touche-à-tout

Constructeur automobile, inventeur, visionnaire et peintre: Lucien Rosengart était tout à la fois. Itinéraire d’un industriel aux 1.000 projets.

Né en 1881 à Paris, Lucien Rosengart montre très rapidement un grand intérêt pour la technique et l’innovation. En 1893, il obtient un CAP en mécanique et ouvre quelques années plus tard un atelier à Belleville dans lequel il fabrique des vis, des écrous et des rondelles. Pour l’anecdote, il invente une vis à bois inoxydable qui est largement utilisée durant la construction des voies du métro parisien, faisant sa fortune. Pendant la première guerre mondiale, il ouvre deux usines qui fabriquent des fusées à obus. C’est alors qu’il rencontre André Citroën, dont les activités sont perturbées en raison de problèmes financiers. Rosengart vient à sa rescousse en créant un organisme financier pour sauver Citroën: la Société Auxiliaire de l’Industrie française (SADI).

Le chemin de l’indépendance

En 1923, alors qu'il est directeur adjoint chez Citroën, Lucien Rosengart est débauché par Robert Peugeot qui veut son aide pour redresser l'entreprise familiale en grande difficulté. Doté des pleins pouvoirs, il s’attelle à redresser la situation de Peugeot mais il connait des fortunes diverses à cause d’opérations hasardeuses et coûteuses. Parmi celles-ci, il crée notamment Peugeot Maritime qui fabrique des canots à moteurs à Levallois-Perret, une initiative qui ne connait pas le succès. Il finit par être évincé en 1927 par Jean-Pierre Peugeot reprend le contrôle des affaires de sa société. La même année, il rachète l’ancienne usine de voiture Bellanger à Neuilly afin de se lancer à son compte dans l’industrie automobile. Il décide d’assembler des Austin Seven sous licence.

Voitures sous licence

Avec le concours de Jules Salomon qu'il a côtoyé lors de ses passages chez Citroën et chez Peugeot, Rosengart met au point une version dérivée de la petite anglaise : la LR2. La Société Rosengart est créée l’année suivante et son blason représente une rose. Le duo s’attelle à démocratiser l’automobile en créant des voitures dérivées de l’Austin Seven (LR2 et LR4) dont la particularité et d’être simples (moteur 750 cc 4 cylindres), compactes et légères (670 kg). Rosengart acquiert également la licence de l’Adler Trumpf et de l’Adler Junior, et développe entre autres la Supertraction, une voiture à moteur de Citroën Traction. Au milieu des années 30, l’industriel français connait des difficultés financières en raison d’un trop grand nombre de modèles au sein de sa gamme qui ne se vendent pas tous bien. Il évite la faillite grâce à des écritures financières et fonde une nouvelle société : la Société Industrielle de l'Ouest Parisien (SIOP), qui succède en 1936 à la SA Rosengart.

Le vent tourne

Comptant jusqu’à 6.000 employés, le constructeur perd une de ses usines durant les bombardements et ne construit plus de voitures durant la seconde guerre mondiale, se contentant de participer à l’effort de guerre. En 1942, Lucien Rosengart quitte la France en raison de ses origines juives et se réfugie aux Etats-Unis. Après le conflit, il revient en France et sent le vent tourner pour sa marque. Il se retire financièrement de ses affaires tout en continuant à superviser le lancement de Rosengart Super 5. La petite marque continue ensuite de vivoter sans son créateur avec des modèles comme la Rosengart Supertrahuit ou l’Ariette. La SIOP dépose le bilan en 1952 et Rosengart lui survit encore trois ans de plus. Après avoir essayé de lancer la Sagaie, une Ariette équipée d’un moteur bicylindre à plat, Rosengart ferme définitivement en 1955.

130 brevets

De son côté, Lucien Rosengart s’est totalement désintéressé de l’automobile. Lui qui a vendu ses part dans la SIOP et le droit d’utiliser son nom comme marque commerciale, se consacre à la peinture naïve et vit dans le sud de la France. On lui doit plusieurs inventions comme la ceinture de sécurité, le boulon inoxydable, l’éclairage de vélo, le premier moteur hors-bord et même le baby-foot même si la paternité de cette dernière est discutée. Durant sa vie, il a déposé 130 brevets, fondé le Salon nautique de Paris en 1926 ou encore organisé les compétitions de la Coupe Florio à Saint-Brieuc. Ce touche-à-tout de génie décède en 1976 dans sa maison de Nice.

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