Les marques disparues – Edsel : quand le marketing ne suffit pas

Bien avant que Toyota ne lance Lexus, Ford a innové fin des années 50 en développant une marque « premium » faisant la part belle au design et la technologie. Une aventure qui ne s’est pas du tout passée comme prévu…

L’histoire d’Edsel, marque éphémère dans la galaxie Ford pourrait se dérouler de nos jours tant l’idée qui était à sa base était en avance sur son temps. Cependant, il faut remonter vers le milieu des années 50 pour découvrir ses origines. A l’époque, Ford essaie de renouveler sa gamme moyenne. Pour ce faire, Robert McNamara (qui sera plus tard le secrétaire d’Etat sous la présidence de John Kennedy et de Lyndon Johnson) commandera une foultitude d’études marketing afin de trouver un nouveau créneau commercial dans lequel se glisser. De nombreux consommateurs sont questionnés sur leur attentes et leurs souhaits. Un énorme budget est dépensé dans des groupes d’études chargés d’inventer « la » voiture qui permettra à Ford de se dégager. Assez rapidement, il apparaît que cette dernière doit se démarquer en portant le nom d’une marque inédite. Pour trouver le meilleur patronyme possible, on fait même appel à la poétesse Marianne Moore qui soumet des propositions incongrues telles que « Baleine intelligente »ou « Mangouste civique » !

Pourquoi faire simple ?

Au total près de 6.000 noms seront évoqués avant que l’état-major de Ford ne choisisse simple « Edsel »,prénom du fils unique d’Henry Ford décédé en 1943 d’un cancer de l’estomac. Au milieu des années 50, le style américain est flamboyant et la nouvelle marque promet d’en faire profiter le consommateur. Les Edsel se doivent d’être très originales et de proposer une technologie de premier ordre. En septembre 1957,Ford dévoile le fruit de son travail au public : on peut dire que le constructeur ne s’est pas facilité la tâche puisque Edsel arrive sur le marché avec une vraie gamme composée de 18 modèles comprenant plusieurs formes de carrosseries ! La particularité la plus visible de ces nouvelles voitures est leur calandre étroite et allongée moulée dans la face avant, du jamais vu jusque-là.

A côté de la plaque

Hélas pour l’équipe d’Edsel, l’accueil du public n’est pas chaleureux du tout. La grande calandre est comparée à l'organe génital féminin, ce qui choque l’Amérique puritaine des années 50. De plus, les voitures ne sont pas si modernes qu’elles veulent paraître puisque les bases techniques sont issues du catalogue de Ford. Même des astuces stylistiques comme les boutons de commande de la boîte automatique placés sur le volant n’arrivent pas à gommer le caractère populaire de la technique des Edsel. Les ventes sont extrêmement timides car les modèles de la nouvelle marque sont plutôt chers et que leur consommation est très élevée, ce qui fait « tache »à un moment où l’économie américaine est en déclin. Enfin, la qualité de finition des voitures est loin d’être irréprochable, ce qui suffit à encore enfoncer le clou.

Existence éphémère

Malgré un changement de look, pour le millésime 59, Edsel ne plait toujours pas et les ventes sont marginales. Le budget de développement est colossal et la production est complexe. Après 63.000 voitures vendues la première année,43.000 en 1959 et seulement 3.000 en 1960, Robert McNamara décide d’arrêter l’hémorragie et Edsel cesse ses activités. Aujourd’hui, l’histoire de la marque fait figure d’exemple dans les écoles de marketing. Comme souvent, cet échec commercial fait l’objet d’un intérêt tout particulier de la part des collectionneurs qui raffolent de ces voitures au look singulier qui semblent être arrivées au mauvais moment. Chez Ford, l’aventure Edsel a rapidement été oubliée et le succès est rapidement revenu avec d’autres produits.

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