Les marques disparues – De la Chapelle : la culture de l'artisannat…

Descendant d’une famille de constructeurs automobiles, Xavier de la Chapelle a souhaité à son tour marquer l’histoire de la voiture française avec des engins intéressants mais condamnés à être produits en très petite série.

Au début du XXesiècle, l’automobile est en plein boom et nombreux sont les petits constructeurs à se lancer dans cette aventure. La région lyonnaise est un terrain fertile pour ses entrepreneurs qui y sont particulièrement concentrés. Parmi ceux-ci, on trouve les frères Guy et Carl De la Chapelle qui débutent leurs activités en construisant des motos, avant de se tourner progressivement vers les quadricycles. Baptisée « Stimula », leur marque produit quelques modèles de voitures avant de cesser ses activités en 1923. Ce nom tombe dans l’oubli, jusqu’à ce que Xavier De la Chapelle, descendant des fondateurs et passionné de voitures anciennes, décide de faire revivre Stimula en 1975. Il s’oriente alors vers le marché du luxe et décide de développer une évocation moderne de la Bugatti. Il s’entoure alors de Jacques Hubert, ingénieur de son état et concepteur de la Matra Djet. Ensemble, ils réalisent 3prototypes de ce qui devient la De la Chapelle 55. Cependant, la mécanique roturière d’origine Opel de celle-ci ne satisfait pas Xavier De la Chapelle qui a de grandes ambitions. Celui-ci s’adresse alors à l’importateur de BMW en France pour utiliser des mécaniques du constructeur bavarois. Le culot paie car l’initiative plait aux dirigeants munichois qui lui cèdent des blocs 6 cylindres en ligne. La première De la Chapelle nait enfin !

La qualité, toujours

C’est au Salon de Genève 1978 que la première « Bugatti » portant le nom de Stimula 55 est exposée. Elle plait à un premier client français qui en fait directement l’acquisition. Disposant d’une carrosserie en fibre de verre reposant sur un châssis-poutre, la voiture n’est pas une réplique de Bugatti. Elle en est inspirée, tout en utilisant une technologique moderne (le moteur 2,6 litres de 143 ch) afin de proposer un agrément de conduite en adéquation avec son époque. L’initiative plait à Messier-Bugatti, alors propriétaire de la marque française, qui autorise De la Chapelle à utiliser son mythique blason. Rien n’est trop beau pour les clients qui sont intéressés par les produits néo-rétro lyonnais. Comme la production est artisanale, toutes les finitions sont possibles, ainsi que les préparations réalisées par les meilleurs spécialistes de BMW comme Hartge, Schnitzer ou Alpina. Le cuir côtoie le bois précieux, les chromes et d’autres matériaux de qualités. Pas de doute, Xavier de la Chapelle a atteint son but.

Mini et maxi

Traitant avec une clientèle très aisée, l’industriel lyonnais imagine des petits modèles à l’échelle 6/10 à des destinations d’enfants très gâtés. Equipées de moteurs thermiques, celles-cis ont aussi luxueuses que les « vraies ». Au fil des années, les « Juniors de la Chapelle » prennent les traits de la Bugatti 55, de la BMW 328 ou encore de la Ferrari 330 P2. Le succès est au rendez-vous (malgré des prix frôlant l’indécence !) et plus de 1.600 exemplaires sont fabriqués. Parallèlement à ses activités au sein de sa propre société, Xavier De la Chapelle préside à la destinée de Venturi entre 1989 et 1992. En même temps, il développe un coupé 55 (1990), ainsi l’Atalante 57S (1992) qui s’inspire de la Bugatti du même nom. La même année, il présente la Grand Prix, une version « sport »de la 55.

Sortie de route

En 1990, Xavier de la Chapelle quine manque décidément pas de ressources décide de diversifier ses activités en imaginant une sorte de « super monospace » de luxe, le Parcours. Equipé d’un bloc V12 Jaguar (puis Mercedes par la suite), ce véhicule entend bousculer les codes du luxe puisqu’il peut embarquer de 6 à 8 passagers, du jamais vu alors dans ce segment. Seulement 3 véhicules sont construits entre 1990 et 1994 et seul le dernier est homologué pour rouler sur la route. Avec son bloc fort de 326 ch, il est loin d’être ridicule. Malheureusement, sa fabrication artisanale coûte très cher et le projet tombe dans l’oubli. Lâché par le groupe Primwest qui se retire également de Venturi, Xavier de la Chapelle essaie poursuivre l’aventure même s’il connait des difficultés financières. Regrettant la disparition des roadsters, le lyonnais décide de se lancer dans ce créneau avec un modèle plus abordable que ces anciennes productions. Avec l’aide d’anciens de Matra et de Venturi, ainsi du designer Francis Lepage, il crée le Roadster De la Chapelle qui est présenté au Salon de Paris 1996. Equipée d’un moteur de Peugeot 405MI16 de 160 installé en position centrale arrière, cette voiture ne manque pas de charme. Un investisseur indien est séduit par le projet et achète les droits du Roadster. De son côté, De la Chapelle s’engage à développer le produit, ainsi qu’une usine qui sera installée dans les environs de Bombay. La voiture est même exposée dans un Salon local mais la mort inopinée de l’investisseur met fin au projet de façon abrupte au projet. La firme britannique Reliant se montre alors intéressée par le Roadster mais seuls 3 véhicules sont assemblés avant qu’elle ne fasse à son tour faillite.

Entre parenthèses

Parsemé d’embuches, le parcours professionnel de Xavier De la Chapelle ne s’arrête pas pour autant. Même si son activité de constructeur automobile est mise entre parenthèses, il se lance alors dans le consulting avec DLC Engineering. Sa société travaille alors pour le constructeur de quadricycles français PGO. Entre 2014 et 2019, il étudie le projet d’une navette autonome appelée Navya. Aujourd’hui, Xavier De la Chapelle revient vers ses premières amours avec le projet fou de l’Atalante V8, un nouveau véhicule au look rétro mais avec des performances bien actuelles. Aujourd’hui, il est difficile de connaître les chiffres de production de la marque. Toujours est-il que les rares De la Chapelle qui se retrouvent de temps en temps sur lemarché se vendent toujours à des prix avoisinant les 100.000 €, témoignant de l’extrême sérieux de la firme dont l’éventuel retour parait fort peu réaliste.

A propos de l'auteur:

Lire plus